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Les limites de la curiosité de l’homme



Traité Haguiga, chapitre 2, Mishna 1

On n’enseigne pas les lois concernant les moeurs à trois personnes (et plus),ni le récit de la création du monde à deux, et ni le Char Céleste à une seule personne, si ce n’est un sage capable de comprendre par lui-même. Celui qui s’intéresse à quatre mystères, il aurait mieux valu pour lui de ne pas avoir été créé: ce qu’il y a au-dessus, ce qu’il y a en dessous, à l’intérieur et à l’extérieur.
Et celui qui n’a pas de respect pour son créateur, il aurait mieux valu qu’il ne soit pas créé.

Commentaire de Maïmonide sur la Michna
Ni le récit de la création du monde à deux : et à plus forte raison, plus que deux. Et nous en avons déjà expliqué la raison: le peuple ne peut comprendre ces enseignements (…). Et ce que nous entendons par « création du monde », c’est la connaissance scientifique; et par « char céleste », c’est la connaissance du divin, c'est-à-dire, de sa présence, de sa pensée, des obligations de ses créatures, des anges, de l’âme, du cerveau humain et de ce qui a après la mort. Ces deux savoirs, scientifique et divin, sont importants et chacun,quelque soit son niveau d’intelligence choisira l’un ou l’autre, selon ses inclinaisons personnelles.
Il aurait mieux valu pour lui de ne pas être créé: puisqu’il s’intéresse à ce qui n’est pas à sa portée. Et à travers sa représentation du monde, il perdra la tête et deviendra fou. (…)
Et celui qui n’a pas de respect pour son créateur: c’est celui qui ne respecte pas l’intelligence que Dieu lui a donné, se laisse aller à ses passions et se comporte comme un animal.

Commentaire de Rabbi Ovadia Mibartenora
Ce qu’il y a au-dessus: de la tête des créatures
Ce qu’il y a en dessous: de la terre
À l’intérieur: à l’extérieur de la frontière orientale du ciel
Et à l’extérieur : A l’extérieur de la frontière ouest. Autre explication : à l’intérieur- avant la création du monde et à l’extérieur- à la fin des temps
Et celui qui n’a pas de respect pour son créateur: c’est celui qui commet une faute en cachette et dit : la présence divine n’est pas là, qui me voit et qui saura ?

Talmud de Babylone, traité Haguiga, page 11B
Ni la création du monde à deux : (…) un homme peut-il interroger sur ce qu’il y a au dessus, au dessous, avant et après ? Non car il est marqué « d’une extrémité du ciel à l’autre ». Tu peux donc chercher ce qu’il y a dans les limites, mais ni au dessus, ni au dessous, ni devant ni derrière.
akadem



LA SCIENCE S’INTERROGE SUR SES LIMITES
Par Patrice LANOY
Après des siècles de certitudes, 
de plus en plus de chercheurs 
 acceptent finalement l’idée 
que le monde narguera toujours leurs 
équations . Et que la science n’est pas
 capable  de donner des réponses à toutes 
leurs interrogations, car elle ne décrit
 pas le réel avec un grand R, elle ne 
fait que décrire des phénomènes.
La science doit revoir à la baisse sa prétention à expliquer le réel, à le rationaliser de manière simple, à y distinguer des lois définitives. 
 Hubert Reeves, Ilya Prigogine et le Pr Pierre Karli. Ce spécialiste du cerveau à l’université de Strasbourg, membre de l’Académie des sciences, s’insurge contre la tentation de réduire le monde à des chiffres : « Notre soif de signification et d’espérance n’est pas prise en compte par la science car on ne sait pas l’introduire dans les équations. La rationalité actuelle, bâtie sur des références qui se mor-dent la queue, est close, fermée à toute espérance. »

Pourquoi de telles préoccupa-tions ? Dans l’ombre des labo-ratoires, les scientifiques se heurtent au « mur du flou ». Panique ! Ils s’étonnent que les équations ne rendent plus totalement compte de ce qui se passe sous les microscopes. L’incertitude envahit les théories. A tel point qu’on ne sait même plus si les découvertes en sont vraiment. Les affaires de la « mémoire de l’eau » et de la fusion froide ont enflam-mé la communauté scienti-fique, provoqué des tollés. Mais elles ont aussi entraîné le développement d’hypothèses, de théories, pour expliquer l’inexplicable.

Épidermiques, ces réactions expriment sur-tout un malaise de la science face à ses capacités de décou-verte. Où sont aujourd’hui les limites de la rationalité ? On ne sait plus. Qu’est-ce qui est démontrable, qu’est-ce qui ne l’est pas ? Il y a malaise et péril en la demeure. Les règles conventionnelles ne suffisent plus toujours à distinguer au fond de l’éprouvette une trou-vaille géniale d’une banale erreur de manipulation.

Depuis Isaac Newton et sa pomme, la vision déterministe de la nature règne sur l’Occident. Elle a été résumée au XIXème siècle par le savant français Pierre Simon de Laplace : « Nous devons envisager l’état présent de l’Univers comme l’effet de son état antérieur et comme la cause de celui qui va suivre. » Le déterminisme impose encore aujourd’hui l’idée que l’Univers peut être décrit avec les lois que décou-vrent les physiciens à la sueur de leur front. Mais cette théo-rie a commencé à vaciller avec la relativité d’Einstein et surtout avec la mécanique quan-tique, qui a créé un flou sur le comportement de la matière. "On doit admettre, écrit Karl Popper, le philosophe autrichien des sciences, que si la mécani-que quantique a raison, le déterminisme laplacien, lui, a tort."

Mais après ces premières brèches, c’est l’édifice tout entier de l’idéologie de progrès qui menace à présent de s’effondrer. Bon nombre de chercheurs reconnaissent que notre physique ne marche qu’à peu prés. Que nos mathéma-tiques constituent des édifices fragiles, que les équations ne sont pas « naturelles » et que des notions comme le désordre sont à l’aise dans la nature. Pis, ces nouvelles idées de « flou » ne se contentent plus de s’appliquer à la lointaine création de l’Univers, aux particules accélérées dans les laboratoires de physique. Notre quotidien transpire lui aussi le chaos...

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